SIGNUM (ADJUNCTA) / SIGNE (CIRCONSTANCE)
On appelle signe une chose qui outre cette idée qu'elle donne d'elle-même quand on la voit, en donne une seconde qu'on ne voit point. Comme lorsqu'on voit à la porte d'une maison une branche de lierre ; outre l'idée du lierre qui se présente à l'esprit, on conçoit qu'il se vend du vin dans cette maison. On distingue deux sortes de signes : les uns sont naturels, c'est-à-dire, qu'ils signifient par eux-mêmes, comme la fumée est un signe naturel qu'il y a du feu, où on la voit. Les autres qui ne signifient que ce que les hommes sont convenus qu'ils signifieraient, sont artificiels. Les mots sont des signes de la seconde espèce ; aussi le même mot a différentes significations, selon les langues où il se trouve ; et c'est de là que bien que tous les hommes aient les mêmes idées, et que les choses ne soient pas différentes selon la différence des climats, chaque langue a ses termes. Il dépendait des hommes d'établir quelque mot qui leur eût plu, pour être le signe de leurs idées, de celle par exemple qu'ils ont du soleil. Dans la Perse, dans la Judée, en Grèce, en Italie, le soleil est le même ; et cependant les Perses, les Juifs, les Grecs et les Latins, n'ont pas choisi les mêmes sons pour être le signe de cet astre. Il n'y a aucun rapport naturel entre ce mot soleil, et l'astre dont il donne l'idée ; s'il y en a une à l'égard de ceux qui savent le français, c'est parce qu'ils savent qu'en France nous avons coutume de marquer par ce mot, cet astre, qui pourrait s'appeler lune, si les hommes étaient convenus de ce terme pour marquer son nom.