Bary, 1660 : La Rhetorique Francoise

Définition publiée par Dylan VANOTTI

René Bary, La Rhetorique Francoise Ou L'On Trouve de nouveaux Exemples sur les Passions & sur les Figures. Ou l'On Traite à Fonds de la Matière des Genres Oratoires, Paris, Pierre le Petit, 1660,  troisième partie, « Des figures », p. 340

 

DES FIGURES.

Mon dessein ne me permet pas de traiter des figures qui composent le langage des Oracles & des Sibylles, des Patriarches, & des Prophetes; Et quand la Rhetorique m’obligeroit d’en parler, mon honneur me dispenseroit d’en faire un grand discours, puisque Monsieur le Grand, Substitud de Monsieur le Procureur General, a tres heureusement développé toutes les difficulitez de l’ancienne Philosophie ; Qu’il n’y a point de mysteres dans les nombres de Pythagore, dans les Tropologies de Platon, & dans les Logogriphes d’Aristote, que ce grand homme n’ait découverts; Qu’il a tres clairement expliqué les Allegories de Moïse, les enigmes de Trismegiste, & les fables d’Orphée, & que le Livre qu’il a fait de ces profondes matieres, sera bein-tost l’occupation de tous les doctes. Mon dessein veut que je laisse aux Logiciens le discours des équivoques; que je m’attache d’abord aux figures qui regardent mon sujet, & que j’illustre d’autant plus cette derniere partie qu’elle est une des plus belles de l’éloquence.

Si la figure consiste en une maniere de parler qui n’est pas ordinairement usitée, les anciens Rhetoriciens n’ont pas eu raison, à mon advis, de distinguer le trope d’avec elle, puisque selon la commune façon de parler on ne presente point l’effet par la cause, ny le tout par la cause. ny le tout par la partie & que les autres tropes ont une expression particuliere.

Ceux qui ont mis de la distinction entre les ornemens dont je viens de parler, ont divisé la figure, en figure de la diction, & en figure de la sentence, & ont rangé sous ces especes les figures qui leur conviennent; Je ne condamne pas la division qu’ils ont faite, mais parce que de parler de tous les membres qu'elles contiennent, ce seroit parler de plusieurs choses que nostre langue desapprouve, & qu’il est plus important au disciple d’avoir la connoissance des applications qu’on doit souvent faire, que d’avoir l’intelligence des exemples qu’on doit souvent rejetter, je ne me contenteray pas de bannir de ce traité les Epiphores, les Anadiploses, & plusieurs autres figures, je tascheray de parcourir délicatement les lieux de l’invention, & de donner des exemples figurez, des plus beaux endroits de cette premiere partie.