FIGURA SENTENTIARUM / FIGURE DE PENSÉE
Définitions
94 : Quintilien
Quintilien, De l’Institution de l’orateur, trad. Nicolas Gédoyn, Paris, Grégoire Dupuis, 1718, livre neuvième, chap. II, « Des Figures du Sens », p. 570-596.
1662 : Jacques du Roure
Jacques Du Roure, La Rhétorique française nécessaire à tous ceux qui veulent parler, ou écrire comme il faut et faire ou juger : des discours familiers, des lettres, des harangues, des plaidoyers, et des prédications, Paris, chez l’Auteur, 1662, Troisième partie, p. 26, 29.
1710 : Joseph de Jouvancy
Joseph de Jouvancy, L’Élève de rhétorique (Candidatus rhetoricae, 1e éd. 1710, 1e trad. 1892), édité par les équipes RARE et STIH sous la direction de D. Denis et Fr. Goyet, Paris, Classiques Garnier, 2019, troisième partie, "De l'élocution", chap. II, "Des figures", p. 170-171 et art. II, "Des Figures de Pensées", p. 182-221.
1764 : Jean-Baptiste Crevier
Jean-Baptiste Crevier, Rhétorique française (1765), Paris, Saillant, 1767, 2 tomes, t. 2, p. 157-158.
1782 : Pierre Thomas Nicolas Hurtaut
P. T. N. Hurtaut, Manuale rhetorices ad usum studiosae juventutis academicae, Exemplis tum Oratoriis, tu Poeticis, editio tertia, Paris, chez l'auteur, 1782, troisième section "De Elocutione", chapitre II "De Sermonis Dignitate", "De figuris", p. 225-227, p. 257, p. 280.
1872 : Colonia
Dominique De Colonia, De Arte rhetorica libri quinque, Lyon, apud Briday Bibliopolam, 1872, Liber primum, chap. I, art. I, "De Figuris sententiarum", p 72-88
Dictionnaires et encyclopédies
Encyclopédie
[Mallet]
[Figure]
Il nous reste à parler des figures de pensées ou de discours que les maîtres de l’art appellent figures de sentences, figurœ sententiarum, schemata ; σχῆμα, forme, habit, habitude, attitude ; σχέω, habeo, & ἔχω, plus usité.
Elles consistent dans la pensée, dans le sentiment, dans le tour d’esprit ; ensorte que l’on conserve la figure, quelles que soient les paroles dont on se sert pour l’exprimer.
Les figures ou expressions figurées ont chacune une forme particuliere qui leur est propre, & qui les distingue les unes des autres ; par exemple l’antithèse est distinguée des autres manieres de parler, en ce que les mots qui forment l’antithèse ont une signification opposée l’une à l’autre, comme quand S. Paul dit :
on nous maudit, & nous bénissons ; on nous persécute, & nous souffrons la persécution ; on prononce des blasphèmes contre nous, & nous répondons par des prieres. [I. cor. c. jv. v. 12.]
Jesus-Christ s’est fait fils de l’homme, dit S. Cyprien, pour nous faire enfans de Dieu ; il a été blessé pour guérir nos plaies ; il s’est fait esclave, pour nous rendre libres ; il est mort pour nous faire vivre.
Ainsi quand on trouve des exemples de ces sortes d’oppositions, on les rapporte à l’antithèse.
L’apostrophe est différente des autres figures ; parce que ce n’est que dans l’apostrophe qu’on adresse tout-d’un-coup la parole à quelque personne présente ou absente : ce n’est que dans la prosopopée que l’on fait parler les morts, les absens, ou les êtres inanimés. Il en est de même des autres figures ; elles ont chacune leur caractere particulier, qui les distingue des autres assemblages de mots.
Les Grammairiens & les Rhéteurs ont fait des classes particulieres de ces différentes manieres, & ont donné le nom de figure de pensées à celles qui énoncent les pensées sous une forme particuliere qui les distingue les unes des autres, & de tout ce qui n’est que phrase ou expression.
Nous ne pouvons que recueillir ici les noms des principales de ces figures, nous reservant de parler en son lieu de chacune en particulier : nous avons déjà fait mention de l’antithèse, de l’apostrophe, & de la prosopopée.
L’exclamation ; c’est ainsi que S. Paul, après avoir parlé de ses foiblesses, s’écrie :
Malheureux que je suis, qui me délivrera de ce corps mortel ? [Ad Rom. cap. vij.]
L’épiphoneme ou sentence courte, par laquelle on conclut un raisonnement.
La description des personnes, du lieu, du tems.
L’interrogation, qui consiste à s’interroger soi-même & à se répondre.
La communication, quand l’orateur expose amicalement ses raisons à ses propres adversaires ; il en délibere avec eux, il les prend pour juges, pour leur faire mieux sentir qu’ils ont tort.
L’énumération ou distribution, qui consiste à parcourir en détail divers états, diverses circonstances & diverses parties. On doit éviter les minuties dans l’énumération.
La concession, par laquelle on accorde quelque chose pour en tirer avantage : Vous êtes riche, servez-vous de vos richesses ; mais faites-en de bonnes œuvres.
La gradation, lorsqu’on s’éleve comme par degrés de pensées en pensées, qui vont toujours en augmentant : nous en avons fait mention en parlant du climax, κλῖμαξ, échelle, degré.
La suspension, qui consiste à faire attendre une pensée qui surprend.
Il y a une figure qu’on appelle congeries, assemblage ; elle consiste à rassembler plusieurs pensées & plusieurs raisonnemens serrés.
La réticence consiste à passer sous silence des pensées que l’on fait mieux connoître par ce silence, que si on en parloit ouvertement.
L’interrogation, qui consiste à faire quelques demandes, qui donnent ensuite lieu d’y répondre avec plus de force.
L’interruption, par laquelle l’orateur interrompt tout-à-coup son discours, pour entrer dans quelque mouvement pathétique placé à propos.
Il y a une figure qu’on appelle optatio, souhait ; on s’y exprime ordinairement par ces paroles : Ha, plût à Dieu que, &c. Fasse le ciel ! Puissiez-vous !
L’obsécration, par laquelle on conjure ses auditeurs au nom de leurs plus chers intérêts.
La périphrase, qui consiste à donner à une pensée, en l’exprimant par plusieurs mots, plus de grace & plus de force qu’elle n’en auroit si on l’énonçoit simplement en un seul mot. Les idées accessoires que l’on substitue au mot propre, sont moins seches & occupent l’imagination. C’est le goût, ce sont les circonstances qui doivent décider entre le mot propre & la périphrase.
L’hyperbole est une exagération, soit en augmentant ou en diminuant.
On met aussi au nombre des figures l’admiration & les sentences, & quelques autres faciles à remarquer.
Littré
Figures de pensée, celles qui sont indépendantes de l’expression, par exemple l’antithèse, l’apostrophe, etc.