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1662 : Jacques du Roure

La Rhétorique française

Jacques Du Roure, La Rhétorique française nécessaire à tous ceux qui veulent parler, ou écrire comme il faut et faire ou juger : des discours familiers, des lettres, des harangues, des plaidoyers, et des prédications, Paris, chez l’Auteur, 1662, Troisième partie, p. 64, 66-67, Quatrième partie, p. 80.

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Furetière

Emotion de l’ame qui cause une dilatation du cœur et un plaisir sensible à la veuë ou à la possession de quelque bien qu’elle ressent. La douleur succede toûjours à la joye, dit le Sage. Le visage est le tesmoin de la joye ; elle est peinte sur le visage. Les larmes de joye viennent d’un excés de tendresse. On pasme de joye, ainsi que de tristesse. Ce mot vient du Latin jocus ; ou de joa, qui en langage Celtique ou Bas-Breton signifie joye, où on dit aussi joaus, pour dire joyeux. Menage le fait venir du Latin gaudia.

 

Encyclopédie

[Jaucourt]

Émotion de l’ame causée par le plaisir ou par la possession de quelque bien.

 

La joie, dit Locke, est un plaisir que l’ame goûte, lorsqu’elle considere la possession d’un bien présent ou à venir comme assurée ; & nous sommes en possession d’un bien, lorsqu’il est de telle sorte en notre puissance que nous pouvons en jouir quand nous voulons. Un homme blessé ressent de la joie lorsqu’il lui arrive le secours qu’il desire, avant même qu’il en éprouve l’effet. Le pere qui chérit vivement la prospérité de ses enfans, est en possession de ce bien aussi longtems que ses enfans prosperent ; car il lui suffit d’y penser pour ressentir de la joie.

 

Elle differe de la gaieté, voyez Gaieté. On plaît, on amuse, on divertit les autres par sa gaieté ; on pame de joie, on verse des larmes de joie, & rien n’est si doux que de pleurer ainsi.

 

Il peut même arriver que cette passion soit si grande, si inespérée, qu’elle aille jusqu’à détruire la machine ; la joie a étouffé quelques personnes. L’histoire grecque parle d’un Policrate, de Chilon, de Sophocle, de Diagoras, de Philippides, & de l’un des Denis de Sicile, qui moururent de joie.

 

L’histoire romaine assure la même chose du consul Manius Juventius Thalna, & de deux femmes de Rome, qui ne purent soutenir le ravissement que leur causa la présence de leur fils après la déroute arrivée au lac de Trasymène ; mes garans sont Aulugelle, liv. III. chap. xv. Valere Maxime, liv. IX. chap xij. Tite-Live, liv. XXII. chap. vij. Pline, liv. VII. chap. liij. & Ciceron dans ses Tusculanes.

 

L’histoire de France nomme la dame de Châteaubriant que l’excès de joie fit expirer tout d’un coup, en voyant son mari de retour du voyage de Saint Louis.

 

J’ai lu d’autres exemples semblables dans les écrits des Médecins, comme dans les Mémoires des curieux de la nature, Décur. 2. ann. 9, observ. 22 ; dans Kornman, de mirac. mortuor. part. IV. cap. cvj. & dans le Journal de Leipsick, année 1686. p. 284.

 

Mais sans m’arrêter à des faits si singuliers, & peut-être douteux en partie, il y a dans les Actes des Apôtres un trait plus simple qui peint au naturel le vrai caractere d’une joie subite & impétueuse. Saint Pierre ayant été tiré miraculeusement de prison, vint chez Marie mere de Jean, où les fideles étoient assemblés en prieres ; quand il eut frappé à la porte, une fille nommée Rhode, ayant reconnu sa voix, au lieu de lui ouvrir, courut vers les fideles avec des cris d’allégresse, pour leur dire que saint Pierre étoit à la porte.

 

Si la gaieté est un beau don de la nature, la joie a quelque chose de céleste ; non pas cette joie artificielle & forcée, qui n’est que du fard sur le visage ; non pas cette joie molle & folâtre dont les sens seuls sont affectés, & qui dure si peu ; mais cette joie de raison, pure, égale, qui ravit l’ame sans la troubler ; cette joie douce qui a sa racine dans le cœur, enfin cette joie délectable qui a sa source dans la vertu, & qui est la compagne fidelle des mœurs innocentes ; nous ne la connoissons plus aujourd’hui, nous y avons substitué un vernis qui s’écale, un faux brillant de plaisir ; & beaucoup de corruption.

 

Littré

Plaisir de l’âme.

Ceux dont il a gagné la croyance et l’appui

Prendront-ils même joie à n’obéir qu’à lui ? [Corneille, Sertorius]