Dictionnaires et encyclopédies

CN. voir Adjuncta rerum

Furetière

Terme de Philosophie. Maniere d’estre. Les accidents n’ont rien de réel et de separé des corps, ce sont des modes qui les diversifient, qui les font estre de telle et telle maniere. En l’Escole on dispute aussi souvent du mode que de la realité.

 

Encyclopédie

Ce sont les qualités qu’un être peut avoir & n’avoir pas, sans que pour cela son essence soit changée ou détruite. Ce sont des manieres d’être, des façons d’exister, qui changent, qui disparoissent, sans que pour cela le sujet cesse d’être ce qu’il est. Un corps peut être en repos ou en mouvement, sans cesser d’être corps ; le mouvement & le repos sont donc des modes de ce corps ; ce sont ses manieres d’être.

 

On donne quelquefois le nom d’accident à ce que nous appellons des modes ; mais cette expression n’est pas propre, en ce qu’elle donne l’idée de quelque chose qui survient à l’être & qui existe sans lui ; ou c’est cette maniere de considérer deux êtres ensemble, dont l’un est mode de l’autre. Voyez l’art. Accident, comme sur la distinction des attributs & des modes, voyez aussi l’article Attribut.

 

Tout ce qui existe a un principe ou une cause de son existence. Les qualités essentielles n’en reconnoissent point d’autre que la volonté du créateur. Les attributs découlent des qualités essentielles, & les modes ont leur cause dans quelque mode antécédent, ou dans quelque être différent de celui dans lequel ils existent, ou dans l’un & l’autre ensemble. Penser à une chose plutôt qu’à une autre, est une maniere d’être qui vient ou d’une pensée précédente, ou d’un objet extérieur, ou de tous les deux à la fois. La perception d’un objet se liant avec ce que nous avions dans l’esprit un moment auparavant, occasionne chez nous une troisieme idée.

 

Il ne faut pas confondre avec les modes leur possibilité, & ceci a besoin d’explication. Pour qu’un sujet soit susceptible d’un certain mode, il faut qu’il ait au préalable certaines qualités, sans lesquelles on ne sauroit comprendre qu’il puisse être revêtu de ce mode. Or ces qualités nécessaires au sujet pour recevoir le mode, sont ou essentielles, ou attributs, ou simples modes. Dans les deux premiers cas, le sujet ayant toujours ses qualités essentielles & ses attributs, est toujours susceptible & prêt à recevoir le mode ; & sa possibilité étant elle-même un attribut, est par cela même prochaine. Dans le troisieme cas, le sujet ne peut être revêtu du mode en question, sans avoir acquis auparavant les modes nécessaires à l’existence de celui-ci : la possibilité en est donc éloignée, & ne peut être regardée elle-même que comme un mode.

 

Il faut des exemples pour expliquer cette distinction. Un corps est mis en mouvement ; pour cela, il ne lui faut qu’une impulsion extérieure assez forte pour l’ébranler. Il a en lui-même & dans son essence tout ce qu’il faut pour être mu. Sa mobilité ou la possibilité du mouvement est donc prochaine, c’est un attribut.

 

Pour que ce corps roule en se mouvant, il ne suffit pas d’une action extérieure ; il faut encore qu’il ait de la rondeur ou une figure propre à rouler. Cette figure est un mode ; c’est une possibilité de mode éloignée. Elle est éloignée dans un bloc de marbre, & elle devient prochaine dans une boule, puisque la rondeur, simple mode dans le bloc de marbre, est attribut essentiel dans la boule.

 

Cette distinction fait voir que la possibilité de modes éloignés peut être attachée ou détachée du sujet sans qu’il périsse, puisque ce ne sont que des modes ; au-lieu que les possibilités prochaines étant des attributs, elles sont inséparablement annexées au sujet. On ne sauroit concevoir un corps sans mobilité ; mais on le conçoit si plat qu’il ne sauroit rouler. Modifier un être, c’est le revêtir de quelques modes qui sans en alterer l’essence, lui donnent pourtant de nouvelles qualités, ou lui en font perdre. Ces modifications peuvent arriver, sans que l’être pour cela soit changé ni détruit. Un corps peut recevoir diverses situations ; il peut garder la même place, ou passer sans cesse d’une place dans une autre ; il peut prendre successivement toutes sortes de figures, sans devenir différent de ce qu’il est, sans que son essence soit détruite. Ces modifications sont simplement des changemens de relation, soit externes, soit internes. Malgré ces variations, l’être subsiste ; & c’est en tant que subsistant, quoique sujet à mille & mille modifications, que nous le nommons substance. Voyez l’article Substance. Sur quoi nous nous contenterons de dire que l’idée de la substance peut servir à rendre plus nette & plus complette l’idée du mode qui la détermine à être d’une certaine maniere.

 

Littré

Terme de philosophie. Manière d’être qui ne peut exister indépendamment des substances, quoiqu’elle puisse être conçue à part abstraitement.

Le mode est un accident que l’on conçoit nécessairement dépendant de quelque substance. [Rohault, Physique, dans Richelet]